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Kungsleden : récit de notre premier trek en autonomie

C’est quoi le Kungsleden ? Pourquoi s’y lancer ?

La « voie royale » est un parcours de trekking mythique à l’extrême Nord de la Suède, au cœur de la Laponie. C’est un havre de nature protégée de 425 km de long, qui peut être parcouru en quatre semaines de marche environ.

Nous avons, pour notre part, décidé de nous attaquer à la partie Nord du chemin, 110 km entre Abisko et Nikkaluokta. C’est le tronçon le plus emprunté car il possède des refuges tous les 20 km et que le sentier y est plutôt bien emménagé.

C’était pour nous l’opportunité d’aller plus loin dans notre approche du trekking avec une première semaine en totale autonomie. C’est à dire avec notre tente, notre nourriture, notre eau et tout le nécessaire pour vivre une belle aventure dans le Grand Nord. Le parcours a l’avantage d’avoir peu de dénivelé ce qui limite les grosses fatigues. Nous y sommes allés en août ce qui correspond à la fin progressive de l’été, mais les jours y étaient encore longs (lever du soleil à 4h , coucher à 22h environ). L’autre avantage du Kungsleden et de la Suède, c’est la possibilité de pouvoir bivouaquer dans la nature en toute tranquillité du moment que les lieux retrouvent leur état d’origine.

Comment s’y rendre ?

Avant de débuter notre récit du Kungsleden, petite introduction sur notre trajet pour atteindre le point de départ de notre trek. Nous avons pris place dans le train de nuit aux alentours de 18h à Stockholm, direction Abisko (notre point de départ). Vers 20h, on nous a annoncé dans un calme troublant qu’un train avait déraillé dans le Nord et que nous allions devoir prendre un bus pour rallier l’arrivée. Nous avons finalement eu besoin de deux bus et plus de 6h de route pour débarquer à Abisko. Le bon côté de cette mésaventure est que nous avons pu observer de très près des rennes puisqu’ils grouillaient sur la route, ce qui ne manquait pas de nous réveiller à chaque freinage et coup de klaxon de notre bus lapon.

Une fois le trek terminé, il faut prendre un bus à Nikkaluokta pour atteindre Kiruna, d’où les transports sont nombreux (bus, train, avion…).

1ère étape : Abisko – Abiskojaure (15 km)

Le premier jour a servi de mise en condition, au programme une petite quinzaine de kilomètres et très peu de dénivelé pour atteindre Abiskojaure dans le parc national du même nom. Les conditions climatiques ne furent pas idéales, un fort vent de face, de gros nuages menaçants et des températures un peu fraîches. Cependant le spectacle de la nature était vraiment splendide.

Nous avons d’abord suivi un long torrent à l’eau glacée. Puis, nous avons atteint un grand lac surplombé par une montagne noire qui nous semblait immense du fait des nombreux nuages bas. Du côté des conditions de marche, le chemin était très bien entretenu, avec notamment de longues portions en planches de bois épaisses pour éviter de s’embourber.

Le soir est tombé en même temps que notre arrivée à Alesjaure. Nous avons choisi de planter la tente entre les arbres dans une zone un peu découverte qui semblait régulièrement utilisée pour le bivouac. Environ 45 minutes étaient nécessaires pour monter la tente, gonfler les matelas et préparer le repas avec notre réchaud à alcool Trangia. Nous devions également vérifier quotidiennement si de vilaines tiques ne s’étaient pas agrippées à notre peau pendant la journée (elles sévissent particulièrement en Suède).

Parenthèse piquante

Notre accessoire indispensable pour ce trek : le headnet (ou filet anti-moustique). Comme son nom l’indique, il nous a permis de nous couvrir la tête pour éviter de nous faire dévorer par les moustiques. Cela ne les a pas empêchés de nous piquer à travers les vêtements, aux mains et surtout aux chevilles (leur mets préféré). Bref, si vous vous rendez dans des contrées nordiques, ne sous-estimez pas la menace moustique.

2ème étape : Abiskojaure – Alesjaure (22km)

La deuxième étape s’annonçait plus longue, heureusement avec un dénivelé limité (+350m). Le chemin était très caillouteux ce qui ralentissait notre progression. Pour autant nous nous en sommes sortis plutôt bien en faisant des pauses régulières pour déguster nos barres de céréales maison (préparées en France) et boire l’eau des petites rivières, ce que nous avons fait durant l’ensemble du trek, l’eau étant normalement très pure.

Nous avons longé un magnifique lac sous un ciel assez ensoleillé pendant plusieurs heures. Le chemin était parfois très boueux aux abords directs du lac, mais le meilleur était pour la fin avec une traversée de rivière glacée pieds nus. Roxane y a presque laissée une tong, sauvée de justesse…

L’arrivée à Alesjaure fut grandiose, plusieurs grandes cabanes surplombant le lac, quelques montagnes enneigées non loin, et une lumière de fin de journée exceptionnelle. Nous avons installé notre tente proche du chemin mais un peu avant le gite afin d’être au calme.

Un petit tour nous a permis de trouver le Graal : des kanelbullar (pâtisserie nordique à la cannelle), et quelques cookies maison. Le gîte était vraiment beau, tout en bois clair, décoré de nombreuses photos et de cartes des environs, sans oublier les traditionnels bois de rennes. Des voyageurs ont sorti des violons et ont animé notre soirée avec de la musique pour le moins folklorique, de quoi nous donner le sourire avant d’aller dormir.

Dormir, pas si facile quand des coassements se sont fait entendre… On a d’abord pensé à des grenouilles, mais il s’agissait en fait de lagopèdes qui effectuaient leur parade nuptiale à la sortie de notre tente. Après les avoir photographiés, ils sont allés batifoler un peu plus loin.

  3ème étape : Alesjaure – Tjäktja (13 km)

L’étape étant courte nous avons pris notre temps pour décoller. Nous avons été « retardés » par la vue magnifique et par une petite hermine qui jouait les stars devant notre objectif. Ensuite notre pas s’est fait plus rapide puisque nous souhaitions arriver tôt pour prendre le temps de nous installer et nous coucher avant les heures les plus froides.

Les torrents et les rivières se sont succédés, les montagnes enneigées également, de quoi remplir rapidement notre première carte SD. Nous étions par ailleurs toujours à la recherche des fameux rennes, sans succès…

Presque l’ensemble du dénivelé (+200m) était concentré dans une dernière montée abrupte, ce qui nous a un peu cassé les jambes et le moral. L’arrivée n’en fut que plus belle. Dernière épreuve de la journée, la traversée d’un torrent via un pont suspendu. Le petit panneau indiquant « one person at a time » (une personne à la fois) n’encourageait pas la traversée…

Le vent soufflait très fort et nous avons donc installé la tente entre de gros rochers, nous avons ensuite complété l’abri en élevant un mur de pierres pour ne pas trop subir les rafales. Il n’y avait presque personne aux alentours, une seule tente et le refuge à proximité semblait presque désert.

La nuit ne fut pas des plus calmes, nous avons subi plusieurs fortes averses, mais la tente a tenu le choc. Le sommeil fut intermittent mais assez long pour envisager de doubler l’étape du lendemain.

4ème et 5ème étapes : Tjäktja – Sälka – Singi  (24 km)

Notre état de forme nous le permettant nous avons décidé de doubler l’étape du jour afin de pouvoir prendre notre temps par la suite.

Nous sommes donc partis très tôt pour la seule ascension du jour, le col de Tjäkja, qui allait nous faire basculer vers une autre vallée. En chemin nous avons fait une petite bataille de boules de neige sur un névé rescapé de l’été. Nous avons pris ensuite le petit déjeuner dans la cabane du col, cet abri inhabité devait être bien utile en cas de conditions difficiles.

Nous entamions la descente quand Yoann repéra un renne, enfin ! Un grand mâle s’avançait seul au sommet d’un relief. Il était assez loin mais sa silhouette et ses bois se détachaient parfaitement dans le ciel blanc. Notre premier renne, quel soulagement, nous ne savions pas encore (spoiler alerte) que nous allions en croiser beaucoup d’autres…

La descente nous permit d’avoir une vue d’ensemble de la vallée et des cours d’eau qui découpaient le paysage de façon si singulière. De quoi prendre encore une fois de beaux clichés.

Nous avons atteint Sälka après une bonne averse, nous y avons pris presque 2h de pause avant de repartir le ventre plein et les vêtements presque secs. De quoi nous remonter le moral pour la deuxième partie des festivités.

Nous n’avons pas vraiment profité de la suite de l’étape, le ciel nous est tombé sur la tête à de nombreuses reprises, rendant le chemin très boueux, voire liquide. Des chaussures plus étanches auraient été d’un grand secours.

Quel soulagement à la vue du refuge de Singi. Pour autant la nuit n’allait pas être de tout repos. La pluie était de la partie et après avoir monté la tente et cuisiné nos petits plats, nous nous sommes retrouvés face à un triste constat : notre toit fuyait, et pas qu’un peu…  Deux sorties furent nécessaires à une réparation hasardeuse. Nous avons fini par nous endormir, sceptiques mais épuisés.

6ème étape : Singi – Kebnekaise Fjällstation (14 km)

Notre avant dernière étape a débuté sous la pluie, entre des montagnes menaçantes d’où s’écoulaient de gigantesques cascades en minces filets. Un décor qui allait bientôt nous réserver un très beau spectacle.

La fatigue du matin nous imposait de nombreuses pauses, des moments privilégiés pour scruter l’horizon à la recherche de grands mammifères. Et puis, dans les trois derniers kilomètres et alors qu’on profitait d’un dernier arrêt : des rennes ! Un petit troupeau d’une quinzaine de bêtes se déplaçait à environ 500 mètres. Nous avons alors décidé de rapidement les rejoindre en coupant à travers « champs », puis en nous installant sur des pierres, derrière des broussailles. Au fil de notre approche, la harde s’était regroupée, avant de se coucher à 200 mètres environ. Mais un plus petit groupe avait discrètement avancé vers nous. Nous sommes restés quelques secondes immobiles, sans les voir, jusqu’à ce qu’ils dépassent calmement d’un petit talus à une quarantaine de mètres de nous. Ils étaient cinq ou six, seulement des mâles avec de grand bois.

Le chef de la bande semblait se rapprocher de nous dans une manœuvre d’intimidation, mais il est finalement resté à une quinzaine de mètres avant de s’éloigner. Ne connaissant pas vraiment le comportement de ces animaux, nous n’avons pas insisté dans notre observation rapprochée, à la fois pour leur tranquillité et pour éviter de se faire empaler.

A Kebnekaise Fjallstation, plusieurs bonnes surprises nous attendaient : un emplacement idéal pour la tente, une absence totale de moustiques (grâce au vent), l’accès à un réseau téléphonique (jusqu’ici ce n’était pas le cas), de vraies toilettes et une petite boutique pour acheter de bonnes vieilles barres chocolatées. Depuis cet endroit partent les expéditions vers le plus haut sommet de Suède, le Kebnekaise, ce sera pour une prochaine fois…

Parenthèse gastronomique

Pour notre premier trek en autonomie nous avons choisi de nous nourrir principalement grâce à des plats lyophilisés. Cela nous a permis de ne pas trop nous encombrer à la fois au niveau du poids et du volume. Contre toutes attentes, ce fut une très bonne surprise gustative, et on ne peut que recommander les plats vendus au Vieux Campeur.

Petit mode d’emploi :
1)  Faire bouillir de l’eau (de rivière dans notre cas, c’est plus sympathique).
2) Verser l’eau (sans se brûler) dans le sachet jusqu’au trait indiqué.
3) Mélanger le tout, avec un couvert d’abord, puis en secouant le sachet (fermé hein).
4) Laisser reposer quelques minutes
5) Déguster !

7ème étape : Kebnekaise Fjällstation – Nikkaluokta (19 km)

Pour la dernière étape, nous avons fait un départ canon et avons profité de la matinée pour effectuer rapidement les dix premiers kilomètres. Cependant la fatigue se fit vite sentir, tout comme les 100 kilomètres précédemment parcourus. Il n’en restait plus qu’une dizaine. L’énergie revint à deux reprises, quand nous avons trouvé un petit bois de renne, puis quand nous avons eu la chance d’observer des grues cendrées au loin.

Cette étape fut un peu plus monotone que les précédentes, la fatigue jouant son rôle également. Nous avions moins la sensation d’être en pleine nature car le sentier ressemblait davantage à une piste et il n’était plus rare de croiser des « randonneurs du dimanche ». Sur le chemin il y avait même un restaurant qui servait des burgers de rennes !

L’arrivée finale à Nikkaluokta fut une vraie délivrance pour nos épaules et nos pieds. Nous avons tout de même pris le temps de déplier notre trépied pour immortaliser la fin de cette belle aventure.

Ce petit hameau était composé d’une belle chapelle sàmi, de petites cabanes de vacances, et d’un grand bâtiment central pour se restaurer ou bouquiner dans une bibliothèque décorées façon trappeur.

Au moment de démonter la tente pour la dernière fois le lendemain matin, nous avions le sentiment d’avoir vécu une belle aventure au cœur de la nature et cela nous a vraiment confortés dans l’idée de refaire ce genre d’expédition en bivouac.

Bilan et chiffres clés de ce trek

  • Kilomètres parcourus : environ 110 km
  • Nombre de jours de marche : 6
  • Nombre de nuits en tente : 6
  • Temps moyen pour monter la tente : 10 minutes
  • Nombre de piqûres de moustique : 15 par personne
  • Nombre de Français rencontrés : 4 (dont deux que nous recroiserons plus tard à Kiruna)
  • Nombre de repas lyophilisés : 6
  • Temps moyen pour ébullition avec le réchaud à alcool : 6-8 minutes selon les conditions météo.
  • Temps moyen pour établir l’ensemble du bivouac (tente, matelas, repas, vérification des tiques) : 40 minutes
  • Temps moyen des pauses :
    • 10 minutes à l’extérieur avec présence de moustiques
    • 20 minutes à l’extérieur sans présence de moustiques
    • 1h à l’intérieur des refuges/cabanes/abris
  • Animaux observés : rennes, hermines, lièvres, grenouilles, grues cendrées, mouettes, petits oiseaux en tout genre, rapaces.

Cet article a 2 commentaires

  1. Kookaburra

    Belle randonnée qui peut se faire en tente, mais au vue des conditions climatiques, les refuges ou cabanes auraient peut-être été une solution plus confortable. Qu’en pensez-vous?

    1. packyourthingsblog

      Hello ! Le bivouac faisait partie de l’aventure, les conditions étaient correctes et nous avons plutôt bien dormi (sauf une nuit). Une belle communion avec la nature. Par contre les refuges avaient l’air assez confortables et sans doute plus adaptés pour faire des rencontres.

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